samedi 1 septembre 2018

Sur le front Russe - 1° septembre

Retour de vacances. c'est triste, mais par contre je rentre le moral remonté à bloc, et pleine d'une confiance linguistique que je ne pensais pas trouver aussi rapidement, facilement, et surtout en lien avec le russe sur un bateau quelque part entre Kangerlussuaq et la baie de Disko.

Euh, oui, j'ai conscience que ça ne parlera pas à tout le monde... mais bon, tous les ans, j'essaye de caler un gros voyage avec ma mère, et cette année, histoire de marque le coup avant de devoir faire ceinture pour cause d'études, nous avons mis cap au nord, tout là haut.

sur la côte ouest, proche du Canada
Voilà. Pendant que mes amis ne jurent que par les mers du sud, je suis aussi allée me promener dans les îles, mais beaucoup plus haut sur la mappemonde.

Quel rapport entre la langue russe et un périple Groenland-Islande -Irlande?
Je vais vous raconter ce qui m'est arrivé, une expérience humaine, j'ose le dire, bouleversante, puisqu'elle vient chambouler mes plans, mais dans le bon sens.


Normalement, je ne suis pas très fan des voyages organisés, mais quand Science et Vie propose une croisière là-haut,sur un bateau de taille raisonnable, et accompagné par des scientifiques, je ne peux pas rater ça.
Et il s'avère que l'équipage du bateau en question était composé en grande majorité par des mauriciens, des indonésiens ( cool, j'ai appris une poignée de mots en bahasa...je trouve super amicale la traduction de merci), et un bon nombre d'ukrainiens parfaitement trilingues ukrainien/ russe/ anglais.
J'ai donc eu pleiiiiiin d'occasion de discuter avec des gens ( 5 au final) ces 10 derniers jours et de tester mes compétences en russe en conditions réelles.

Et ça s'est révélé fort instructif, puisqu'au final on m'a bien comprise, j'ai a peu près compris les réponses, les gens ont été ravis de pouvoir papoter en VO avec une française. Des conversations assez basiques avec 3 personnes ( qui travaillaient en restauration et donc étaient très occupés, mais ont quand même échangé quelques mots avec moi) et d'autres conversations beaucoup plus construites avec Andreï, mon nouveau pote natif d'Odessa chargé du nettoyage des couloirs et des chambres à l'étage où je me trouvais et que j'ai donc croisé plusieurs fois par jour.

Mais surtout, j'ai sympathisé avec quelqu'un de vraiment, vraiment remarquable pendant ces vacances, même si sa discrétion naturelle le pousserait à nier ce qualificatif, ou a virer au rouge tomate de confusion.
Une rencontre, comme on en fait une fois, deux peut-être au maximum dans une vie, quelqu'un avec qui le courant est passé instantanément et réciproquement: Alexandre le grand.
Ou plutôt, Oleksandr, originaire de Kiev, qui doit bien faire son 1m95.

Un monsieur d'une gentillesse et d'une modestie incroyables qui malgré son poste à responsabilité (chef de l'accueil des passagers sur un bateau où il y avait 480personnes, toutes susceptibles de venir râler à la moindre contrariété), a sacrifié un peu de son temps pour venir parler avec moi - entre autres, mais quand même pas mal avec moi...
Je ne sais pas pourquoi ni comment, mais le fait est que la sympathie a été immédiate, ce qui m'a faite penser " ce type à l'air extrêmement sociable et amical, et il a un petit accent probablement russe ou ukrainien, il FAUT que je trouve le moyen d'aller discuter avec lui"

Ce n'est que trois jours après que j'ai appris que non seulement le très sympathique Oleksandr était bien ukrainien comme je le supposais, mais également un hyperpolyglotte maîtrisant, tenez vous bien... 11 langues. Ukrainien d'origine, avec des parents un peu russes, un peu ukrainiens un peu polonais ( donc 3 langues familiales, déjà avec ça, il est parti avec un avantage considérable), parlant français avec juste un petit accent, anglais, et une poignée d'autres dont les langues nordiques.
C'est bien la première fois que je rencontre un hyperpolyglotte en chair et en os, et pour info, on est considéré comme hyperpolyglotte à partir de 6 langues maîtrisées couramment.
On trouve parfois sur le net des interviews ou vidéos de gens comme ça, certains ont l'air plutôt sympas, d'autres semblent un peu se la raconter...

Mais là, pas du tout,  il semblait presque gêné, et tenté de s'excuser d'avoir des facilités, qu'il attribue à un don presque extérieur plus qu'à un travail studieux ou à une bonne mémoire.
Il semble que je sois aussi du genre douée pour les langues, mais je peux vous assurer que sans travail assidu, je ne serais capable de rien.
L'autre point que j'ai envie de mettre en avant c'est qu'une bonne mémoire, si possible auditive, n'est pas non plus la panacée... il faut surtout qu'elle soit structurée. Et, oui, je confirme, plus on apprend de langues, plus il est facile d'en apprendre d'autres.
Mais n'ayant pas eu de contacts avec d'autres langues dès la petite enfance, je n'arriverais jamais à ce niveau, mais si j'arrive un jour à parler russe aussi bien que lui parle français, je serais déjà contente.

Et figurez vous que c'est ce qui est en train d'arriver. Car non seulement nous avons le même centre d'intérêt, mais par sa gentillesse, sa disponibilité, sa franchise et son attitude naturellement encourageante, il a réussi sans même le chercher à faire tomber d'emblée la barrière mentale qui aurait pu m'empêcher de discuter.
Au lieu de ça, malgré mes 3 pauvres années très scolaires il y a 25 ans et le fait que je m'y sois remise il y a peu près un an et très sérieusement au quotidien seulement depuis janvier, je me suis retrouvée à discuter quasiment à vitesse normale, presque sans accent ( et surtout, sans gros accent français, qui envoie systématiquement les accents toniques se promener en fin de mot, et fait qu'on est reconnaissables entre mille) Dixit 3 personnes différentes qui ne se sont pas concertées et n'avaient aucune raison de me passer du cirage, ..dont mon hyperpolyglotte qui sait de quoi il parle, et que j'ai donc (modestement) réussi à épater un peu de mon côté. Mais au pire, pas grave, autant les gens vont trouver mon brin d'accent indéfinissable très classe ou très rigolo, au choix.

J'ai aussi réussi à épater 2 autres personnes au passage: ma mère qui ne s'attendait pas à m'entendre débiter du russe à tout berzingue, et... moi-même. Je ne pensais sérieusement pas en être capable, mais le fait est que j'ai récupéré ET dépassé mes compétences du lycée.

Et ça , je le dois à 3 personnes: Michel Thomas et sa méthode audio ( qui est mort et que je ne peux pas remercier), Igor Illyin et ses lectures de textes littéraires qui m'ont vraiment aidée à m'imprégner de la sonorité et de la rythmique de la langue (heureusement il est bien vivant, et je peux lui laisser un message de remerciement prochainement sur son livre d'or), et donc l'ami Oleksandr que j'ai remercié chaleureusement avant de partir car je tenais à ce qu'il sache l'effet positif involontaire qu'il a eu sur moi, même s'il s'est trouvé bien étonné et rouge de confusion face à cette effusion de remerciements.

Mais pour le coup, il s'agit réellement d'une rencontre exceptionnelle, du genre qui va influer sur ma vie future, et sur mes choix de réorientation professionnelle. Parfois, on rencontre par hasard des gens, et on ne se rend compte que des années plus tard qu'ils ont eu sur vous une influence bénéfique, et alors impossible de le leur dire!

J'ai eu l'immense chance que ça se passe,et surtout que je m'en rende compte, en moins de 10 jours, ce qui m'a permis de remettre en perspective ma reprise d'études en histoire de l'art et musicologie: ça m'intéresse toujours, c'est une expérience que je veux quand même continuer - et de toute façon, il est trop tard pour changer de choix à 15 jours de la rentrée, je partais pour un an à la base, peut être plus, MAIS il y a 9 chances sur 10 que ça ne dure qu'un an comme prévu. Juste le temps de me faire plaisir à faire une chose qui me plaît un an dans ma vie. Mais en ménageant une place quand même importante au russe.

De fait, j'hésitais avec les langues,le russe en particulier, mais je n'étais pas sûre d'en avoir la capacité, je sais maintenant que j'ai une vraie affinité avec la langue, qui était restée cachée très longtemps à cause de l'enseignement français. je ne sais pas ce que vaut celui en Belgique, mais pour une question pratique et économique, je pense plutôt tenter à l'avenir d'alterner des mois de stage de langue en immersion, avec des retours en France pour refaire les finances quelques mois en intérim. Avec peut être à la clé une orientation en traduction, vu mon arrière plan littéraire.
Avec toujours en solution complémentaire, le diplôme de prof de français pour étrangers que j'ai, sans l'avoir jamais valorisé, car je ne voulais pas me retrouver à faire des cours standards pour un groupe de 25 ou 30 élèves, qui, au final n'aiderait personne. Car impossible d'estimer les besoins individuels de chacun. Le "à la carte", en face à face ou en petits groupes me tente plus, le relationnel n'est pas le même, et pour peu que j'enseigne à des gens dont je parle la langue, je peux piocher dans cette source pour débloquer des choses rapidement ( testé avec Andrei, dont je parlais plus haut, qui a eu un mini-cours de français gratuit et a réussi à maîtriser le R français, pourtant compliqué, en moins de 30 secondes chrono parce que j'ai pu lui trouver une solution pratique tirée d'un son du russe.. mais pas du R russe!)

Après des mois de coups de stress et d'hésitation, je vois se profiler une solution à mes tâtonnements professionnels - mieux vaut tard que jamais - mais aussi, une très belle amitié potentielle.
Car évidemment, pour garder une trace de cette rencontre marquante, j'ai voulu faire une photo avec mon inspirateur, mon alter-ego de presque deux mètres:  lui au pied d'un escalier moi deux marches plus haut avec  mon mètre " 80 moins 22" comme dit une copine. Mais j'ai quand même l'air d'une maquette ou d'un échantillon à côté 😁. Et il a même demandé à ce que je lui maile la photo, pour une fois que ce n'est pas moi qui insiste!

Donc oui, la première impression était la bonne et la connivence effectivement réciproque. Et maintenant, je ne peux qu'aller de l'avant puisque j'ai de nouveaux alliés dans cette aventure. Je ne ramène pas de babioles de mes voyages, je ramène des souvenirs marquants... et des amis. Ca vaut tout l'or du monde!

du coup, pour fêter ça, le drapeau ukrainien, qui représente symboliquement le ciel bleu au dessus d'un champ de blé

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