mercredi 25 août 2021

Problèmes de polyglottes (1) Préjugés et questions à la c.. enfin, à la noix.

 C'est bientôt la fin des vacances, allez, un sujet en marge.

Simplement parce que je suis tombée hier sur le Tumblr " Polyglots problems", qui existe pourtant depuis longtemps mais que je n'avais jamais croisé, et que si tout ne me correspond pas, certains m'ont faite sourire ou rappelé des choses. Il y a à prendre et à laisser parmi les publications, certaines ne servent une fois de plus qu'à bâcher le français et sa manière de compter, hahaha, très original les angophones, essayez d'apprendre d'autres langues, vous verrez qu'il y a encore plus étranger ailleurs. au fait pourquoi tu t'astreins à apprendre une langue si c'est pour passer ton temps à la qualifier d'insensée, illogique , sans queue ni tête...?

Mais d'autres ont plus d'intérêt. Et vont me donner l'occaison de développer des choses..

Les questions absurdes et les idées reçues ( pas forcément méchantes, mais qui sont souvent reloues)

- Ho tu parles / apprends ( insérer langue XYZ), dis quelque chose
- Euh, oui, mais quoi?

Un grand classique. C'est bien d'être curieux, mais, amis non polyglottes, ou polyglottes en devenir, non, on n'est pas une machine à débiter des phrases, comme ça. LA conversation normalement a un contexte.
C'est comme arriver et dire à quelqu'un " dis quelque chose". 99% du temps la répose sera " hein? quoi?" et 1% " quelque chose".
C'est pas qu'on ne veut pas, mais c'est comme demander à quelqu'un qui pratique la musique de chanter quelque chose à minuit 30 à la fin d'un repas, l'estomac plein, sans préparation et sans accompagnement. Fun, quand il s'agit d'une morceau de Mozart (vécu): c'est peu probant et ça ne rend pas du tout justice à la réelle compétence, à la langue ou au morceau.

En général je résouds le problème en répondant dans la langue en question que justement je ne sais pas quoi dire, je n'ai rien à dire, et que de toute façon, ça n'a pas d'importance, je pourrais te réciter ma liste de courses que tu ne verrais pas la différence.. Ou un vieux dialogue de manuel du lycée, dont allez savoir pourquoi, je me souviens par coeur.

Avec son corollaire

apprends - moi un gros mot.

Tu ne veux pas plutôt d'abord savoir... être sympa? demander ton chemin? commander un café? non? Bon ben, je t'en apprends un marrant, la marque Blédina est invendable en Russie, car ça ressemble beaucoup à ce qu'on appelle une poufiasse ou une péripatétipute ici.
Inversement une marque de voiture a tenté de vendre la E-tron en France, sans grand succès, va savoir pourquoi.


Ce qui donne l'impression que je parle mieux qu'en réalité ...
Ce qui nous amène à:

" Savoir dire bonjour, au revoir merci, je t'aime en plusieurs langues et rendre les gens tout choses en parlant leur langue..

Même si on ne sait pas dire plus.
J'ai fait à la demande d'un copain une vidéo où je disais bonjour en 20 langues pour un projet " journée de la salutation" à son travail, en Russie. Et une autre avec une dizaine de langues pour la bonne année: J'ai déjà oublié coment dire bonne année en chinois ou bonjour. Par contre à cette époque " bonjour "é tait le seul mot que je connaissais en georgien, j'ai bien augmenté la quantité depuis! Yeah!

Ou savoir dire parfaitement " je ne parle pas le XYZ" en XYZ, ce qui fait que les locuteurs te répondent " ha mais si c'est parfait, tu parles.. " et embrayent sur une longue conversation à vitesse normale.

Et là on arrive à une chose que je veux dénoncer. Le problème n'est pas tant la question, que ce qu'elle peut sous-entendre. Ce n'est pas celui qui naïvement la pose, c'est que ce quelqu'un est potentiellement la cible d'arnaqueurs.

Tu apprends le Mandarin depuis un mois? tu parles couramment?

Alors comment dire, un mois, c'est ce qu'il m'a fallut rien que pour l'alphabet géorgien, par exemple ( voir les sujets précédents)
Et maintenant le règlement de comptes:
Sur ce point, je tiens à signaler que beaucoup de sociétés ou de gens peu scrupuleux, et surtout depuis le premier confinement, tentent de vendre des méthodes miracles, en langues ou autres. J'ai vu une publicité " réussir le grand écart en 3 semaines et 8 minutes par jour".. ce n'est même aps le temps nécessaire pour séchauffer. Suivi immédiatement par " faire le grand écart en 15 jours et 5 minutes par jour". J'attends presque: devenir marathonien en 10 jours et 3 minutes de cours par jour ou apprendre à nager sous la douche du matin.

Donc oui il y a des offres alléchantes qui promettent d'apprendre les langues en 7 semaines, sans effort, en y passant emaximum 15 minutes par jour: C'EST DU PIPEAU. Ils jouent sur l'ambiguité d'"apprendre une langue", jamais ils ne préciseront le niveau d'arrivée. Et, effectivement, sans passer par l'alphabet, j'aurais pu me contenter d'apprendre des phrases types en géorgien et être capable de commander un café à l'aéroport de Tbilissi.
Sauf que, si c'est ce genre de compétence que vous cherchez, vous pouvez l'apprendre gratuitement avec des tutos sur youtube, en répétant les phrases toutes faites jusqu'à ce qu'elles rentrent. Si c'est ce que vous voulez pour un voyage, pas de souci, c'est légitime. Mais ce ne sera pas vraiment parler une langue, puisque vous serez incapables de lire les panneaux, de poser des questions et de comprendre les réponses. En tout cas ce n'est clairement pas mon objectif.
Là on est encore à la limite de la légalité sans tomber dans la vraies escroquerie.

Et ces sociétés peu scrupuleuses jouent exactement sur ça, l'envie d'arriver à un résultat sans effort, en promettant monts et merveilles contre (beaucoup) d'espèces sonnantes et trébuchantes. Quand elles ne clament pas que leur solution est la meilleure : les bandeaux publicitaires " elle a appris 2 langues en 2 heures, les professeurs de langue la détestent" " arrêtez de prendre des cours delangues longs, chers et sans résultats, les professeurs de langue vous mentent". Ca c'est 100% de l'arnaque, vous ne reverrez jamais vos sous ( plus de 200 euros a priori). De plus déniger le travail de professionnels en les accusant d'arnaquer, pour mieux vous vendre du rêve, c'est exactement le discours qui doit alerter. Quelqu'un d'honnête va à la limite dire " j'ai une autre méthode qui vous conviendra peut être mieux", mais pas " les sécialistes vous mentent". Ca cest presque LA phrase tympe de la tenative d'hameçonnage.

Et je ne parle pas en tant que prof, puisque je ne le suis pas, mais en tant que quelqu'un qui apprends les langues, a testé beaucoup de méthodes pour se concocter la sienne, mélange de tout un tas de choses, et qui est prête à expliquer gratuitement comment elle procède à qui est intéressé.
La solution miracle c'est " implique toi, multiplie les sources, passe du temps, ne te contente pas de ce qu'on te donne en cours, le prof te mets sur une voie, mais il faut que tu la suive toi, il n'y a PAS de secret"


Et il y a les remarques moins agréables:

Je commence gentiment:

"l'allemand, c'est tellement rude", quand ce n'est pas " l'allemand c'est tellement moche".

 Effecivement si ta référence de l'allemand, c'est uniquement celui aboyé par les caricatures dans les films de guerre ou que tu l'as appris avec Papy Boyington.. Va essayer d'écouter les Lieder de Schubert par Dietrich Fischer Dieskau ou Elisabeth Schwaerkopf ( oui comme la marque de shampooing 😑) et on en reparle.

On peut penser que..

Tu es vu comme un dieu dans ton pays parce que tu parles plus de 2 langues...
Mouais pas en France, avec un monolinguisme d'état valorisé


Mais en général c'est plutôt ça qui se passe : Les questions ou affirmations dites en général avec le petit ton supérieur qui ne me donne pas du tout envie d'être sympa.

Mais combien de langues tu as besoin de savoir?


Genre: tu n'es pas obligée, tu perds ton temps, tu pourrais faire mieux que ça.
NON!
En revanche tu pourrais faire mieux que juger mes centres d'intérêt, par exemple aller jouer aux billes sur l'autoroute.

Quelle langue tu as dis que tu apprenais, déjà? Mais pourquoi, Ca n'a aucune utilité.
Personne n'a jamais dit que je devais choisir les langues en fonction d'un critère pratique.

En gros, jusqu'à "Pourquoi?" pas de problème. c'est légitime de poser la question, quand c'est fait sans a priori. Par contre pour le jugement sur l'utilité, tu vas aller rejoindre ton petit camarade sur l'autoroute.

Mais pourquoi tu apprends CETTE langue, ça ne sert à rien!

Il commence à y avoir du monde sur cette autouroute non?

Pour préciser, celles là, je les ai entendues souvent. Trop.  Quand elles ne sont pas accompagnées de conseils du genre " tu ferais mieux d'apprendre l'anglais, ça au moins c'est utile" prigué par quelqu'un qui a un niveau A2 en anglais le plus souvent.
A quoi je réponds " yes indeed, but, you know, my level is B2, it means that I already speak english way better than you do.. ho, and please, go play with marbles on the highway"

Concrètement la question de l'utilité, je l'ai eu au sujet de l'Allemand ( langue officielle ou Co-officielle en Allemagne, Autriche, Belgique, également connue au Luxembourg, aux Pays-Bas, au Lichtenstein, en Suisse, que j'ai parlé en Turquie au bazar...) et qui est probablement la première d'Europe en nombre de locuteurs...
Bizarement, dans ma région Provence, on ne la pose pas à ceux qui apprennent l'italien, pourtant bien plus limité en nombre de pays qui le parlent et de locuteurs.

J'ai eu la même question à propos du Russe ( ça sert à quoi? ben le russe fait partie des 8 langues les plus parlées au monde et est encore souvent véhiculaire dans les anciennes républiques soviétiques, et non l'URSS n'existe plus depuis 30 ans, et si tu ne sais pas ce qu'est une langue véhiculaire, je te propose d'aller le vérifier, toi aussi, sur l'autoroute) et du Japonais.

Je vous livre la question d'une ex-collègue, A. à mon retour du Japon . Parce que c'est l'occasion: " haaa tu as mangé des nems? - euh, non les nems c'est au Vietnam. Ha bon, ben Nihao alors.  - Ah non, bien tenté, mais c'est en Chine qu'on dit ça.  - et c'est pas pareil? je veux dire au Japon, on parle chinois non?"
(j'ai presque eu envie de lui expliquer que même en Chine on ne parle pas " chinois", mais rentrer dans le détail du cantonais, du mandarin, etc... comment dire. elle était gentille mais n'avais pas le niveau)
Enfin, c'est moins pire que l'autre collègue qui m'a dit qu'apprendre le Russe était nul et sans intérêt, apprends l'anglais blabla...


Autant dire que s'embarquer avec des gens comme ça sur le fait qu'une langue n'est pas seulement une langue, mais un fait culturel, que tu ne t'intéresse pas seulement à la langue mais aussi aux) pays où elle est parlée et aux gens qui la parlent, que tu ne perds pas tu temps à apprendre une langue mais que tu gagnes des informations sur un pays...  je cite l'excellente chaîne " Défakator" " haa la tristesse, quand les notes de violons sonnent mouillées et sentent l'asperge "alors que vous essayez d'expliquer quelque chose à quelqu'un de particulièrement borné.
Il va sans dire que quand les choix sont encore plus confidentiels (je pourrais aussi bien apprendre le tatar ou le bashkir, vu que j'ai des potes de cette origine). Autant dire que peux de gens, et surtout pas ceux de mon travail, savent que j'ai décidé d'apprendre le géorgien, sinon je n'en aurais pas fini.

Ou les langues anciennes/ mortes:
Apprendre le latin ou n'imorte quelle langue morte:
- mais plus personne ne le parle!" "parce que j'ai l'air de m'en soucier?"
Dédicace à Maryse et Véronique qui apprennent le vieux-norrois pour le plaisir. Team grec ancien par choix et latin par obligation ici :) Et je ne parle pas de ceux qui choissisent une langue régionale, encore plus mal vue par la mouyenne des gens que les langues mortes. dire qu'on apprend le latin, ça fait intello. Dire qu'on apprend l'occitan, ça fait encore un peu hippie du Larzac coincé dans les années 1970. Dire qu'on apprend l'arpitan, c'est s'exposer à un " mais c'est pas une langue ça!"

A toi qui vient de faire cette remarque, sache que depuis l'autre monde, Georges Dumézil t'observe et te juge:
Dédicace à Georges, mon idole. Lui et moi avons un point commun.
Et ce n'est pas le goût des langues mis plutôt le sens très personnel du rangement.

Bon, il y aura d'autres problèmes, j'ai encore à dire..

mardi 24 août 2021

3 mois en Géorgie...continue ou pas?

La question se pose, puisque j'ai commencé mon petit défi le 24 mai en me disant, que je verrai au bout de 3 mois.
Puisque je devais à cette date être au mois sur le départ pour la Russie, et donc très occupée, les cours commeçant le 1° septembre.
or, ...

Et bien, je m'attendais à tout, sauf à un couteau dans le dos de la part de mon université.
La France accepte de me laisser partir, les échanges d'étudiants sont considérés comme une raison valable d'aller dans une zone rouge Covid. La Russie recommence à laisser entrer les Français, sans distinction. C'est la direction de mon université qui a pris la décision de ne pas laisser partir les étudiants tant que la zone serait rouge. Certains avaient reçu l'information que leur visa était en cours d'émission quand même... Je n'arrive pas à comprendre cette décision, je ne vais pas passer un an à faire des allers-et-retours , je suis vaccinée, j'aurais eu une quarantaine à l'aller et en revenant en France.. . Et je ne suis même pas sur site à Toulouse je ne risque pas de contaminer le campus, j'habite à 400 kilomètres. La seule explication que je vois, c'est que nous laisser partir, ça signifie surtout devoir accepter les étudiants russes en provenance de la zone rouge... Mais ils auraient aussi une quarantaine, donc je ne comprends PAS.

Que je ne puisse pas commencer en septembre je m'en doutais. Par contre ce que je prends très mais alors très mal, c'est que l'université m'informe le 26 août que ça sera comme ça tant que la zone sera classée rouge: la Russie est classée rouge depuis plusieurs semaines. Et bordel! Le gouvernement estime que ça ne pose pas de problème pour les échanges universitaires. Samer! (ville du pas-de-Calais)

Mais donc vous imaginez mon état de consternation et de colère. Ce qui signifie que je prépare déjà les plans 2, 3, 4, 5...Et c'est peut être là que le Caucase va devenir un atout, donc, je vais continuer à ménager une plage quotidienne pour le géorgien.


4 possibilités se dessinent:

- Soit une réduction de ma mobilité au seul second semestre m'obligeant donc à m'inscrire aux cours pour le 1° semestre et à passer les examens en janvier à Toulouse et le second en immersion en Russie.

- soit un premier semestre à distance via le net et en présence à compter de février en Russie ( mais a priori, pas prévu par Saint Pétersbourg)

- soit, ce qui serait le mieux, mais le moins probable, le décalage de ma mobilité de février 2022 à janvier 2023, l'université de Saint Pétersbourg me le propose, mais j'ai peu d'espoir que cet arrangement soit accepté par la très rigide administration française, pour qui une année, c'est septembre à Juin et c'est tout. Enfin, parfois les miracles arrivent. Les professeurs référents n'y sont pas opposés, mais les instances de l'université n'ont pas donné leur réponse.
Ce qui veut dire ne pas passer les examens de janvier à Toulouse, puisque si je passe les examens ici, je n'ai pas à les passer là-bas et je n'ai pas de justifications d'y rester à la rentrée suivante.

La 4° étant évidemment que tout soit annulé si je n'ai pas reçu mes documents d'ici là ou si la frontière est refermée entretemps. Ce qui me mettrait vraiment mais vraiment de travers!
Et là, je devrais alors passer tous les examens de l'année entre mai et juin.

Donc pour le moment, vu que je n'ai rien d'autre de prévu, et que si c'est la première solution qui est retenue, les cours en France ne reprendront pas avant le 20 septembre, que ce soit par correspondance pour moi, sur place pour les autres, ou en vidéo conférence pour tous...
Je rempile au moins pour un quatrième mois, il me faut bien ça pour ne pas sombrer dans l'inertie à force d'attendre et de naviguer à vue sans savoir ce que je ferai dans 2 semaines.

Si c'est l'option 2 qui est retenue, cours par visio conférence avec la Russie, le décalage horaire fera qu'ils termineront assez tôt dans l'après midi me laissant donc du temps pour les autres activités sportives, musicales et intellectuelles. Donc, possibilité de continuer tranquillement aussi, à mon rythme.
L'option 3... paradoxalement, pas de cours avant février, ça me laisserait moins de temps, car petits boulots, recherches pour le sujet de mémoire et autre projets pro sur le feu.

Mais la promenade dans le Caucase me plaît, et j'ai bien l'intention de la faire durer.
Et donc les petites victoires de ce mois ci...

- Vaille que vaille j'arrive à 400 mots, ou un peu plus, je n'ai pas le compte exact ( j'ai hacké un peu de vocabulaire en listant les mots qui sont les mêmes en russe et en géorgien, et que donc, je connais déjà, à peu de choses près)

- J'ai eu l'occasion de prononcer 2 phrases, 2 ( par manque de temps). C'est peu mais c'est un début. L'interlocuteur était un allemand passionné de langues qui apprend aussi le géorgien et revenait de vacances là bas. Et au bout de 2 mois et demi, ce n'est pas rien d'avoir simplement osé. Et vu qu'on a gradé le contact et qu'il a des amis georgiens, en trouver parmi eux qui apprennent le français ne doit pas être très difficile.

- Je continue à déblayer tranquillement la grammaire, et peu à peu des points s'éclairent grâce aux nouvelles informations.

- J'ai eu une révélation

Moment " Euréka!"

Celui où on se dit " mmmm mais?! Mais oui, c'est ça!". Ce genre de moment est super précieux quand on apprend une langue. Celui où on a compris par soi-même quelque chose, et que donc ce quelque chose restera gravé en tête.

J'ai brièvement mentionné précédemment, une vedette dont j'admire le travail. Lui. Coup de foudre artistique: c'est vraiment la première fois que j'ai vu quelqu'un faire réellement du théâtre sans parole, donc il a clairement fait changer mon point de vue sur son art. Et, qui, outre le fait d'être excellent dans son domaine de prédilection est un monsieur cultivé, intéressant, féru de littérature, drôle... et polyglotte. La tête et les jambes. Comment pourrais-je ne pas être fan d'un gars comme ça?
Son nom en géorgien est mentionné sous la photo.
J'avais lu une interview en russe où il expliquait le sens de son nom de famille, qui a deux sens possible: le matin il signifie " l'aurore" et le soir " première étoile" , ce qui en fait un aptonyme tout à fait adapté à un danseur étoile. C'était déjà bien classe comme nom.

Mais plus exactement j'ai trouvé le sens exact de ცისკარი, l'aurore (ou donc l'étoile du berger), qui est composé des mots " ciel"ცა, décliné au génitif, et "porte"კარი .
L'aurore en géorgien se dit textuellement "la porte du ciel". Un mot valise comme on peut en trouver en allemand*

TILT!
Yep, Nikoloz "Porte-du-ciel". C'est magnifiquement poétique comme nom.

Au delà de l'anecdote , je trouve extrêment intéressant se savoir que le mot totalement officiel pour "l'aurore" est " la porte du ciel", ça en dit beaucoup sur l'approche culturelle, l'expressivité, et l'importance de l'art et de la poésie jusque dans les mots quotidiens. C'est d'ailleurs ce qui m'attire beaucoup dans cette culture: le goût pour l'art, la musique et la danse en premier lieu.
Nul doute que la langue cache encore d'autres perles de mots de ce genre, que je compte bien dénicher et m'en faire un collier!
Allez, quelques autres qui me plaisent bien:

ნაცრისფერი: "natsrisperi" gris, textuellement " couleur de cendre"
ღიმილი: " rimili", le sourire, qui donne le sourire, rien qu'à prononcer le mot.

ce gâteau s'appelle " sourire au noir" si j'en crois le dictionnaire, ზანგის ღიმილი. Je ne sais pas s'il y a des sourires d'autres couleurs, ou du sourire au lait et aux noisettes...
je n'ai toujours pas le niveau pour les recettes, mais ce site me donne en effet le sourire en général

ჩურჩხელა:  "tchourtchkhela" outre que j'ai très envie de goûter, ça m'éclate de le prononcer.
ჩუხჩუხი: " tchoukhtchoukhi", le murmure, le clapotis de l'eau, à rapprocher de  шуршание, le bruissement en russe, qui fait aussi partie de mes mots coup de coeur, avec ses synonyme, qui jouent tous sur a sonorité.
მიჯნურობა " midjnuroba", je l'avais déjà mentionné aussi, parfois traduit par " amour", c'est plus que ça, encore une perle. Il est lié au mot მიჯნა ( Midjna) " frontière, limite", c'est textuellement un amour sans bornes ( un mot très littéraire issu de la littérature courtoise du moyen-âge). Raide dingue en version moderne.
Et hop une fois de plus, la tiédeur et la demie-mesure n'ont pas leur place ici. Expressivité et enthousiasme.

* J'ai trouvé l'explication dans une méthode en allemand, bien plus complète que tout ce que j'ai déniché en français, je vais ajouter le lien dans les ressources. Evidemment elle exige un bon B2 en allemand pour s'en servir ( double bénéfice pour moi, ça me permet de garder le contact avec l'allemand, ce que je n'ai pas toujours le temps de faire)
allez pour le plaisir, comment dit on "aurore " en allemand?
Morgenrot: le rouge du matin. L'allemand et ses mots valises très descriptifs.
En français, c'est un emprunt direct au latin Aurora " lever du jour".. on ne peut faire plus factuel.
Je vais garder précieusement ma "porte du ciel", c'est nettement plus joli.

lundi 2 août 2021

S'adresser (poliment) à quelqu'un en géorgien

Voilà qui sera utile, en tout cas, je trouve intéressant de le savoir.

J'ai donc appris que:

- On s'adresse à quelqu'un qu'on connait peu en utilisant le pronom vous, comme en français. SIMPLE! Et "tu" pour les proches, évidemment.

- Même en situation formelle, la manière de s'adresser à quelqu'un c'est Monsieur/ Madame et .. son prénom: Madame Thamar, Monsieur Irakli, etc... (totalement impossible en français, sinon, ça fait grand banditisme). Bon, ça implique donc de connaître le prénom de quelqu'un.

Mais quelque part, je préfère ça: il est plus facile de mémoriser le prénom de quelqu'un qu'un nom souvent long  + le patronyme (cf le russe, qui oblige à des circonvolutions, puisqu'il n'y a pas de "monsieur, madame" et on ne dit plus depuis 30 ans camarade ou citoyen...) Qui n'est pas toujours évident à trouver. Et j'ai des réticences à m'adresser à quelqu'un sans l'équivalent d'un monsieur ou madame, j'ai l'impression d'être horriblement impolie 😅

Question existentielle: si je fais connaissance - tout est possible avec les 6 degrés de séparation - avec la vedette russophone d'origine géorgienne que j'écoute régulièrement, dois-je lui dire à la russe " Николай Максимович" ( Prénom + patronyme.. qui demande donc en plus de connaître le prénom du père de la personne. Bon, l'exemple pris est celui d'une vedette donc son patronyme est publiquement connu) ou à la géorgienne " Bat'ono Nikoloz", soit " Monsieur Nikoloz"? L'un paraît extrêmement formel, l'autre fait très " Monsieur mon pote "  pour la française que je suis...Ou vu qu'il parle français Monsieur + nom de famille, le standard chez nous, mais qui aux oreilles géorgiennes fait très froid, presque impoli, limite on claque verbalement la porte au nez.

Ce petit exemple trilingue simplement pour mettre en avant que les normes de politesse sont différentes dans trois pays et trois cultures différentes. En pratique, dans l'hypothétique cas précédent, maîtrisant mieux le russe, je commencerais pas le russe, quitte à enchaîner sur les deux autres versions en disant " ne sachant pas comment m'adresser à vous, voilà, choisissez" assorti d'un radieux sourire 100% français, qui semble-t-il fonctionne aussi en Géorgie ( ou alors le sourire immense est la particularité dudit monsieur), mais pas du tout en Russie.  Car oui, il n'y a pas que la manière de parler à prendre en compte, mais aussi le paraverbal et ça, ce sont des informations très compliquées à trouver...

- Les prénoms ont souvent une voyelle finale en i au nominatif, qu'il perdent quand on rajoute Monsieur et Madame: Daviti => monsieur Davit, Thamari => Madame Thamar. Mais pas toujours: Irakli => Monsieur Irakli garde son -i et, là,  il n'y a pas moyen de deviner quand on le garde et quand on l'enlève, c'est à l'usage. Non, ça va je ne râlerais pas, chaque langue a toujours un truc un peu aléatoire...

- On manque de repère et forcément dans une langue qui n' a pas de genre, les prénoms ne donnent pas d'indication. Ou pire, nos habitudes peuvent nous tromper. La proximité de la France avec l' Espagne et l'Italie fait qu'un nom en -a sera perçu comme par défaut féminin, or Gia et Beka sont des hommes. Le -o est perçu comme masculin, or Nino est une femme en Géorgie et un homme en Italie. Eliso est une femme (Elise)
Manana est une femme, mais son nom sera très dur à porter si elle vient en France. Tamazi (Thomas) est un homme, Thamari est une femme.

Je crois qu'à chaque prénom qui pose problème je vais rechercher des photos en ligne pour voir si je dois rajouter monsieur ou madame.

Et c'est là qu'arrive notre cas vocatif: il n'est pas casse-pieds du tout! En fait:
- mot en [i] au nominatif = la voyelle est remplacée par [o]
- mot en [a] ou [e] = on ajoute [o] après la voyelle
- mot en [o] ou [u] = on ajoute un [v]
- pluriel: tout se décline comme des mots en [i] sauf rares archaïsmes donc... peinard.

Et en fait, à part d'écrire de la poésie lyrique, il y a 7 mots qui ont encore un vocatif, 2 très utiles ( monsieur et madame), deux familiers (homme et femme, un peu au sens " hombre! mujer!" de l'espagnol), 2 qui servent uniquement à s'adresser aux prêtres et aux bonnes soeurs, et ..." dieu". Donc hors prière ou expression figée" mon dieu!", c'est peu utile.

Il reste donc

- ბატონი [ bat'oni], ბატონები [bat'onebi] : le monsieur, les messieurs qui devient au vocatif ბატონო! [bat'ono]ბატონებო![bat'onebo] plus le ou les prénoms, avec ou sans leur i, selon les cas, c'est ça le pénible.
- ქალბატონი [kalbat'oni] , ქალბატობატონი [kalbat'onebi], la dame, les dames qui devient au vocatif
ქალბატონო ![kalbat'ono] ქალბატონებო![kalbat'onebi] Madame! Mesdames!

D'après le dictionnaire, c'est lié au verbe ბატონობა, régner.
Dans le fond, c'est exactement la même construction qu'en français:
seigneur => sieur => mon sieur ( respectueusement prononcé par les serviteurs) => monsieur
Et ქალ- c'est " la femme" + maître donc la femme qui règne en maître :en latin, domina (la maîtresse de maison "domus") => dama => dame => Ma dame=> madame.

et pour le familier:
- კაცი [k'atsi] : homme, être humain => კაცო [k'atso]: hombre! bonhomme, l'ami, mec! à éviter en contexte formel quand même
- ქალი [kali]: femme=> ქალო [kalo]: mujer! ( je ne pense pas que ce soit aussi familier tendance grossier qu'en français)
Hop, une chanson qui comporte ქალო dans le titre


ici, c'est plutôt "petite":  "petite, ne tombe pas amoureuse, ne te maries pas, tu es encore jeune, reste chez toi et grandis d'abord" ( quelqu'un a eu la bonne idée de traduire le texte en anglais, merci). Apparemment toute l'école du coin la connait, ça doit être une chanson traditionnelle.

et "ho mon dieu":
- ღმერთი [ɣmɛrti] => ღმერთო !
ღმერტო ჩემო ! Mon dieu ( enfin, dieu mon!, l'expression est à l'envers par rapport au français)

Et c'est tout, concrètement ( pour les bonnes soeurs, c'est "mère" et pour les curés c'est "père" au vocatif, donc là encore, rien de perturbant pour les francophones. Mais rien d'urgent non plus)
Et donc jusqu'ici tout va bien.

qui vient ici?

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Novembre... réorganisation

Hé oui, après un peu plus de 5 ans de reprise des langues, et de reprise des études un séjour en Belgique, un séjour malheureusement écourté...